
Depuis 2011, Hout Info Bois réalise une enquête bisannuelle afin de dresser un état des lieux de la construction en bois en Belgique. La 7e édition de cette étude, menée en collaboration avec Embuild Bruxelles et Embuild Wallonie, nous livre des enseignements importants sur l’évolution récente du secteur, tout en mettant en lumière les défis et opportunités à venir pour cette filière durable et prometteuse.
Un ralentissement de la construction bois
Après plusieurs années de croissance, la construction bois en Belgique connaît un ralentissement en 2023 et 2024.
Indéniablement, ce déclin reflète une morosité qui concerne l’ensemble du secteur de la construction et dont les raisons sont multiples. Parmi elles, on note la hausse qui frappe le coût des matériaux et les taux d’intérêts hypothécaires et contribue à dissuader nombre de candidats bâtisseurs, mais aussi le manque de main-d’œuvre qualifiée.
La construction bois subit aussi les conséquences d’une pression réglementaire qui joue parfois en sa défaveur, ainsi que de la concurrence d’autres modes de construction.
Pourtant, si les causes de ce ralentissement sont identifiables, le constat n’en reste pas moins surprenant ! Car la construction bois, avec ses atouts écologiques et son potentiel en termes de réduction des émissions de CO2, est une solution pertinente face au défi du changement climatique.
Le questionnement est donc légitime : comment la construction bois peut-elle réussir à se déployer à une plus large échelle dans les années à venir ?
Des parts de marché stables au niveau de l'habitat unifamilial
En 2024, environ 8 % des nouvelles maisons construites en Belgique le sont des constructions en bois, soit 1 810 habitations unifamiliales.
En revanche, dans le secteur de la rénovation, de l’extension ou de la surélévation, le bois représente seulement 2 % du marché. Un chiffre étonnamment bas quand on sait les atouts du matériau – notamment sa légèreté et son adaptabilité – pour ce type de projet.
Cette part du bois dans la construction reste stable, mais ne parvient pas à décoller aussi rapidement que certains le souhaiteraient, malgré les bénéfices environnementaux incontestables du matériau.
Ceci est d’autant plus vrai du côté des projets autres que unifamiliaux, comme les immeubles d’appartements ou les bâtiments tertiaires (bureaux, hôtels, établissements de santé, etc.), où le choix du reste reste très marginal.
Le nombre de constructions en bois de ce type a diminué en 2023-2024 par rapport aux deux années précédentes, mais pour une surface du murs construits plus importante : ce qui laisse à penser que, si moins de bâtiments se construisent, ceux-ci sont en revanche de plus grande taille.
Ces projets de plus grande envergure sont réalisés par une trentaine d’entreprises principalement situées en Wallonie.
Moins d'entreprises actives dans la construction bois
Autre évolution marquante pointée par l’étude 2023-2024 : la diminution du nombre d’entreprises de construction bois.
Depuis la première étude menée en 2011, la tendance était alors restée plutôt à la hausse, mais en 2023-2024, on observe une baisse de 6% du nombre d’acteurs présents sur le marché. Cette contraction est due en partie à des faillites, à des départs à la retraite sans repreneurs et à la concurrence des grandes entreprises.
Une majorité de ces fermetures concerne des petites entreprises, souvent celles qui réalisent un faible volume de constructions en bois.
Par ailleurs, on note par ailleurs une forte concentration de l’activité de construction en bois: il ressort ainsi que 15% des entreprises du secteur réalisent plus de 50 constructions par an, concentrant ainsi plus de 65% du marché résidentiel en bois.
Ces entreprises leaders sont aussi celles qui s’attaquent le plus fréquemment aux projets non résidentiels. Cette concentration du marché semble indiquer un fossé croissant entre les petites structures et les géants du secteur, qui ont passé le cap de la préfabrication et de l’industrialisation.
Des atouts indéniables pour l'avenir
Malgré cette période de ralentissement, la construction bois dispose d’atouts majeurs qui devraient favoriser son développement futur.
Premièrement, la Belgique dispose des ressources nécessaires avec des forêts en croissance et une filière au savoir-faire reconnu.
En outre, le bois est un matériau naturel, renouvelable, et très performant d’un point de vue environnemental. Il présente un bilan carbone bien meilleur que celui d’autres matériaux comme le béton ou l’acier, grâce à sa capacité à capturer le CO2 tout au long de son cycle de vie.
Le matériau bois s’inscrit également pleinement dans l’optique d’économie circulaire et de circuit court, ce qui renforce encore sa pertinence et son attractivité dans un contexte de préservation de nos ressources et de lutte contre le réchauffement climatique.
À cet égard, l’approche modulaire et la préfabrication en bois offrent une solution particulièrement adaptée pour répondre aux défis futurs du secteur de la construction : réduction des coûts, amélioration de l’efficacité des méthodes de travail et réponse à la pénurie de main-d’œuvre.
Activer les leviers de la croissance
Bref, tous les ingrédients sont là pour que la construction bois emprunte la voie de la croissance ces prochaines années. Pour encourager ce développement, plusieurs leviers doivent être activés.
Tout d’abord, des efforts sont nécessaires pour soutenir les petites entreprises et leur permettre de se différencier sur le marché. La préfabrication, bien que nécessitant d’importants investissements, pourrait permettre à ces entreprises de se développer, mais pour cela, un soutien en matière d’infrastructure et de formation est essentiel.
De plus, la construction de bâtiments publics en bois reste trop timide en Belgique. Lancer des projets publics visibles, “vitrines” de la construction bois, pourrait jouer un rôle crucial dans la valorisation du matériau. Ces bâtiments publics constitueraient des références tangibles et inciteraient les acteurs privés à emboîter le pas.